Introduction
La République
Démocratique du Congo (RDC) traverse un moment décisif de son histoire. Alors
que les négociations de Doha sont présentées comme une nouvelle chance de paix
entre Kinshasa et le Mouvement du 23 Mars (M23), la vérité est toute autre :
ces pourparlers portent le germe d’une balkanisation déguisée de notre
pays. Derrière le langage diplomatique de “cogestion” et de “stabilité
régionale”, se cache une stratégie méthodique du Rwanda et de ses parrains
occidentaux pour arracher à la RDC sa souveraineté et mettre la main sur
ses richesses.
La situation n’est pas
nouvelle. Depuis des décennies, l’Est du Congo subit des agressions répétées,
justifiées par des prétextes sécuritaires comme la présence du FDLR.
Pourtant, les rapports de l’ONU – notamment le Groupe d’experts de 2012,
2022 et 2023 – sont sans équivoque : le Rwanda et l’Ouganda sont
directement impliqués dans le soutien militaire, logistique et financier du
M23, et dans le pillage systématique des ressources congolaises.
Aujourd’hui, accepter les conditions de Doha reviendrait à répéter l’erreur du passé : légitimer un mouvement criminel, institutionnaliser l’occupation et préparer le morcellement de notre territoire.
I. Une guerre qui dure depuis 30 ans : le M23, dernier visage de
l’agression contre la RDC
Depuis la chute de Mobutu
en 1997, le Congo est la cible de guerres par procuration. Les armées
rwandaises et ougandaises ont envahi notre pays à plusieurs reprises,
installant des rébellions successives : RCD, CNDP, et aujourd’hui le M23.
- Le CNDP de Laurent Nkunda (2006-2009), soutenu par
Kigali, avait déjà imposé une logique de négociation par les armes, se
terminant par l’accord du 23 mars 2009. Cet accord, mal appliqué, permit à
des milliers de rebelles de s’infiltrer dans l’armée congolaise, ouvrant
la voie à de nouvelles mutineries.
- Le M23 est né en 2012 de cette mutinerie. Dès le
début, les Nations unies ont documenté que le Rwanda fournissait armes,
munitions et soldats. En novembre 2012, le M23 a occupé Goma,
humiliant une fois de plus l’État congolais.
- Après un repli momentané, le M23 est revenu
en force à partir de 2021, occupant le Rutshuru, Nyiragongo et Masisi.
Aujourd’hui, il administre de facto ces zones, perçoit des taxes illégales
et exploite des mines.
Ces agressions répétées ne sont pas des accidents de l’histoire. Elles répondent à une stratégie claire : affaiblir la RDC, contrôler ses ressources stratégiques (coltan, or, cassitérite, étain) et créer des zones d’influence étrangères.
II. L’accord de Washington : la grande manipulation diplomatique
En 2023, les États-Unis
ont facilité un accord entre Kinshasa et Kigali, présenté comme une avancée
pour la paix. Mais derrière cette façade, se cache un piège.
- Narratif imposé : le Rwanda a réussi à faire reconnaître
le FDLR comme “cause profonde” de l’insécurité. Or, ce groupe,
composé de moins de 500 combattants vieillissants (selon l’ONU), n’est
plus une menace sérieuse pour Kigali.
- Silence coupable : l’accord n’imposait aucune sanction ou
retrait contraignant au Rwanda, alors même que les preuves de son soutien
au M23 étaient accablantes.
- Préparation du terrain : en insistant sur le dialogue avec le
M23, Washington ouvrait la voie à une normalisation politique de ce
mouvement criminel.
Ainsi, l’accord de
Washington fut une victoire diplomatique pour Kigali et un revers stratégique
pour Kinshasa.
III. Les négociations de Doha : la balkanisation à visage couvert
À Doha, sous médiation
qatarie, un scénario dangereux se dessine :
1.
Cessez-le-feu conditionné : le M23 ne se retire pas réellement, il exige des garanties politiques
et administratives.
2.
Cogestion des zones occupées : certains diplomates occidentaux suggèrent une administration
conjointe entre Kinshasa et le M23, au nom de la “protection des populations”.
3.
Institutionnalisation de l’occupation : accepter ce schéma reviendrait à reconnaître
une entité armée soutenue par un pays voisin comme acteur légitime de
gouvernance sur le sol congolais.
C’est exactement ce que cherche le Rwanda : transformer son occupation militaire illégale en un statut légal déguisé, pour ensuite contrôler l’Est du Congo sans avoir besoin d’y afficher son drapeau.
IV. La faiblesse militaire congolaise : un atout pour Kigali
La vérité est douloureuse
: la RDC a une armée sous-équipée, minée par la corruption et incapable de
sécuriser son territoire.
- Les FARDC manquent de moyens
modernes, de discipline et d’un commandement unifié.
- La dépendance aux forces étrangères
(MONUSCO, EAC, maintenant SADC) empêche l’émergence d’une souveraineté
sécuritaire.
- Sur le terrain, les civils sont laissés à
eux-mêmes, pris en étau entre les exactions du M23 et l’impuissance des
autorités.
Kigali connaît ces
faiblesses et les exploite. Comme l’écrit le chercheur Filip Reyntjens,
spécialiste des Grands Lacs, “le Rwanda agit avec une assurance totale, sachant
que la RDC ne dispose pas des moyens militaires et diplomatiques pour s’opposer
efficacement à son agenda.”
V. La stratégie du Rwanda : diviser pour régner
Le Rwanda n’a jamais
caché sa volonté d’instrumentaliser l’Est du Congo. Sa stratégie repose sur trois piliers :
1.
Narratif du FDLR : en exagérant la menace de ce groupe, Kigali justifie ses
interventions. Pourtant, même le Groupe d’experts de l’ONU (2022) a
conclu que le FDLR n’est pas une menace stratégique, et que son existence sert
de prétexte aux agressions.
2.
M23 comme paravent : en utilisant un mouvement congolais “de façade”, Kigali cache son
implication directe et évite d’apparaître comme agresseur.
3.
Exploitation des ressources : selon Global Witness et l’ONU, une grande partie du coltan, de
l’or et du tungstène exportés par le Rwanda provient en réalité des zones
occupées de la RDC.
La finalité est claire : contrôler les richesses congolaises et imposer une balkanisation économique et politique.
VI. Le peuple congolais doit dire NON
Accepter la cogestion
proposée à Doha serait une trahison. C’est :
- Reconnaître la légitimité d’un groupe armé
responsable de massacres (Kiwanja, Kishishe, Bunagana).
- Ouvrir la voie à un précédent dangereux :
demain, d’autres milices réclameront le même statut.
- Enterrer l’unité nationale et ouvrir la
porte à une partition de fait du pays.
Les Congolais doivent tirer les leçons du passé. L’accord du 23 mars 2009, qui avait intégré le CNDP dans l’armée et les institutions, n’a pas apporté la paix : il a enfanté le M23. Aujourd’hui, répéter la même erreur serait suicidaire.
VII. Quelles voies pour une paix juste ?
1. Refuser la cogestion
Aucune portion du
territoire congolais ne doit être négociée avec des criminels. La paix ne peut
être bâtie sur l’impunité et la compromission.
2.
Renforcer l’armée nationale
- Moderniser les FARDC.
- Lutter contre la corruption interne.
- Développer une doctrine militaire centrée
sur la défense du territoire.
3. Mobiliser la diplomatie panafricaine
La RDC doit renforcer ses
alliances avec l’Angola, la Tanzanie, l’Afrique du Sud, et exiger des sanctions
internationales contre le Rwanda pour agression, comme le recommande le rapport
du Groupe d’experts de l’ONU (2022).
4.
Mobilisation citoyenne et diaspora
- Les Congolais doivent s’organiser,
manifester et refuser publiquement toute cogestion.
- La diaspora, particulièrement active en Europe et en Amérique du Nord, doit renforcer le plaidoyer auprès des institutions internationales.
Conclusion : La paix ne peut pas être une capitulation
Les négociations de Doha
ne doivent pas être une nouvelle trahison de la RDC. Après l’accord de
Washington qui a consacré le narratif du Rwanda sur le FDLR, il serait
suicidaire d’accepter aujourd’hui une cogestion des zones occupées par le M23.
La paix véritable ne
viendra ni des compromis imposés, ni des deals diplomatiques biaisés. Elle
viendra d’une résistance nationale, d’un renforcement militaire, et
d’une diplomatie ferme qui place la justice et la souveraineté au cœur
des priorités.
Les Congolais doivent le
dire haut et fort : le Congo n’est pas à vendre, ni à partager. La
balkanisation n’est pas une option. Nous voulons une paix fondée sur la vérité,
la dignité et la souveraineté.
Preparé
par :
Sam
Nkumi & Gilberte Bienvenue
African
Rights Alliance
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